Éloge de l'ennui.
#104 Ou pourquoi c'est une bonne chose pour la créativité de s'ennuyer.
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Au programme
L’idée entre les vaches et les montagnes
La force de l’ennui
Le portable, cet ennemi
La méthode de Fleming
Conclusion
L’idée entre les vaches et les montagnes
Mercredi 27 mars. 17h11. Dans le train, quelque part entre Bourg-Saint-Maurice et Aix-Les-Bains.
Je regarde les montagnes défiler à vitesse grand V sous mes yeux. Mon portable n’a que 36% de batteries et j’en ai besoin jusqu’à 22h, heure d’arrivée à Paris, alors je le garde sagement dans mon sac. À ma droite, mon amour tape frénétiquement sur son clavier d’ordinateur au fur et à mesure qu’il enchaîne les réponses à son flot d’e-mails.
Moi, je regarde par la fenêtre. J’observe les gens dans le wagon et me demande à quoi peut bien ressembler leur vie. Je m’ennuie.
Je repense alors à cette citation de J.K Rowling qui m’obsède depuis hier : “Je prenais le train de Manchester à Londres et je regardais par la fenêtre des vaches, je crois, et j'ai juste pensé : "Ce garçon ne sait pas qu'il est sorcier — il va à l'école des sorciers." Je n'ai aucune idée d'où ça vient. Je pense que l'idée flottait le long du train et cherchait quelqu'un et mon esprit était suffisamment vide alors j'ai décidé de zoomer là-dedans.”
Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours détesté l’ennui. Petite, je me rappelle aller chercher ma mère dans la cuisine, “Mamaaaaaan ! Je m’ennuie ! Qu’est-ce que je peux faire ?”. “Mais c’est bien de s’ennuyer Maud” elle me répondait souvent, à ma plus grande frustration. J.K Rowling me l’a rappelé aussi.
Alors, me voilà, comme elle, dans le train à contempler les vaches, et j’attends. J’attends qu’une idée flottante veuille bien se présenter à moi. C’est là qu’elle m’est venue, l’idée de cette newsletter : un éloge sur l’ennui.
La force de l’ennui
La semaine dernière, j’étais invitée par le Club Med à profiter de quelques jours au ski avec une dizaine de podcasteurs et leurs invités. Un jour, ils ont proposé un atelier sur la créativité. Naturellement, j’y suis allée.
Au bout de 5 minutes, l’organisatrice Caroline nous demande : “Sur une feuille pliée en quatre, dessinez-moi les dernières fois où vous vous êtes senti créatifs”. En une minute, j’ai dessiné les quatre scénarios qui me sont venus à l’esprit : en train de lire ou écrire, en agrafant des choses sur mon moodboard, sous la douche, et en me faisant masser.

Ce qui m’a surprise, en réalité, ce ne sont pas mes réponses, mais la similarité avec les réponses des autres. Mes deux coéquipières de débrief avaient aussi dessiné une douche, l’écriture, la détente, et des moments créatifs. Dans la salle, beaucoup ont pensé aux transports, aux balades, ou encore à la vaisselle.
J’avais déjà entendu dire que les moments de détente étaient souvent propices à la créativité, mais je n’avais jamais réalisé à quel point c’était vrai avant de voir toutes ces réponses similaires dans la salle. Bien sûr que les idées nous viennent sous la douche ! Mais pourquoi au juste ?
Les scientifiques ont fait le lien en 2014, lors d’une étude où ils ont A/B testé la capacité d’idéation sur un groupe après les avoir ennuyés avec une tâche répétitive. Ils ont découvert que le groupe qui avait fait des tâches répétitives était plus créatif, et que ceux qui avaient lu des textes ennuyeux l’étaient encore plus.
Dans son TED Talk, Manoush Zomorodi nous explique que “lorsque vous vous ennuyez, vous activez un réseau dans votre cerveau appelé "mode par défaut". Notre corps se met en pilote automatique pendant que nous plions le linge ou que nous nous rendons au travail à pied, mais c'est en fait à ce moment-là que notre cerveau s'active vraiment.“ En mode par défaut, on relie des idées disparates, on résout des problèmes, et on ferait ce qu’on appelle une "planification autobiographique". Ces moments où on fait une rétrospective de notre vie, qu’on note nos erreurs, nos grands moments, et qu’on se fixe des objectifs et étapes à suivre pour les atteindre.
Le portable, cet ennemi
Le problème, de nos jours, c’est qu’il est presque impossible de trouver des moments d’ennui. Comme le dit l’écrivain Neil Gaiman :
“[Les idées] viennent de la rêverie, de la dérive, de ce moment où vous êtes juste assis là… Le problème de nos jours, c'est qu'il est vraiment difficile de s'ennuyer. J’ai 2,4 millions de personnes sur Twitter qui me divertissent à tout moment… c’est vraiment difficile de s’ennuyer. Je suis bien meilleur à ranger mon téléphone, faire des promenades ennuyeuses, essayer de trouver l'espace où m'ennuyer. C'est ce que j'ai commencé à dire aux gens qui disent "Je veux être écrivain", je dis " super, ennuie-toi.”
Selon le professeur d’informatique Gloria Mark, il y a dix ans, nous déplacions notre attention au travail toutes les trois minutes. Aujourd'hui, nous le faisons toutes les 45 secondes, et ce tout au long de la journée. Une personne moyenne consulte ses e-mails 74 fois par jour et change de tâche sur son ordinateur 566 fois par jour. Sauf qu’à chaque transition, le cerveau utilise des ressources neuronales pour le faire, et ces ressources sont, bien évidemment, limitées.
“Le téléphone nous apporte beaucoup, mais il nous prive de trois éléments clés de la découverte : la solitude, l'incertitude et l'ennui. C'est toujours de là que viennent les idées créatives.” — Lynda Barry
La méthode de Fleming
Il y a quelques jours, alors que je plongeais dans les archives de la newsletter de Manson Currey, je suis tombée sur une anecdote intéressante de Ian Fleming. L’auteur des livres James Bond aurait écrit chacun des livres James Bond en moins de deux semaines en utilisant la règle de l'ennui forcé.
Sa méthode consistait simplement et bêtement à s'isoler dans une chambre d'hôtel banale, dans un endroit où il n'y avait aucune distraction, ce qui l'obligeait à se concentrer uniquement sur son écriture. Cet environnement ne laissait à Fleming que deux choix : écrire ou ne rien faire.
Cette méthode n’est ni nouvelle, ni unique. Beaucoup d’autres artistes en ont parlé, notamment Raymond Charles : “L'important est qu'il y ait un espace de temps, disons quatre heures par jour au moins, pendant lequel un écrivain professionnel ne fait rien d'autre qu'écrire. Il n'est pas obligé d'écrire, et s'il n'en a pas envie, il ne doit pas essayer. Il peut regarder par la fenêtre, faire le poirier ou se tordre sur le sol. Mais il ne doit faire aucune autre chose de positif, ni lire, ni écrire des lettres, ni feuilleter des magazines, ni faire des chèques. Écrire ou ne rien faire. . . Je trouve que ça marche. Deux règles très simples : a) vous n'êtes pas obligé d'écrire ; b) vous ne pouvez rien faire d'autre. Le reste vient tout seul.”
Ça m’a rappelé mon envie de départ avec mon nouveau bureau. J’avais créé cette pièce avec l’intention de ne pas y autoriser les écrans, pour pouvoir me conditionner à l’écriture. Je n’ai pas tenu un seul jour. Entre tous mes livres, papiers, aquarelle, moodboard, et écrans, j’ai beaucoup trop de choses à faire dans cette pièce à part écrire.
Est-ce qu’il faudrait que je me force à prendre des trains tous les jours sans portable ni connexion internet pour espérer travailler ou avoir des idées ?
Conclusion
Il y a deux ans, j’ai commencé à mettre des habitudes en place pour mieux gérer ma consommation des écrans et réseaux sociaux :
Mon portable ne passe plus les portes de ma chambre et je me réveille avec un radio-réveil.
Je laisse mon portable dans mon sac quand je suis avec d’autres personnes.
J’essaie de faire une soirée solo et déconnectée par semaine.
Je ne consulte pas les réseaux sociaux avant 14h.
Mais, alors que j’étais dans le train à regarder les montagnes, avec mon amour à côté oscillant entre son ordinateur et son portable comme tous les autres passagers du wagon, je n’ai pas pu m’empêcher de penser qu’il allait falloir que je redouble d’efforts sur ces habitudes, car le vent souffle dans l’autre sens.
Alors, sur les prochaines semaines, voici les habitudes que j’ai décidé de tester :
Ne pas utiliser mon portable ou mon ordinateur avant 11h30.
Faire la méthode Fleming pendant 3h une fois par semaine.
Couper les écrans à 22h.
Sur ces belles promesses, je te laisse sur cette dernière citation de Steve Jobs : “Je crois beaucoup à l'ennui. L'ennui permet de se laisser aller à la curiosité, et c'est de la curiosité que naissent toutes les choses.”
Voilà, c’est tout pour aujourd’hui ❤️.
Maud
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Bravo ! Toujours une stimulation intellectuelle et un délice de lire ses newsletters.
Dans ces moments d'ennui, le portable, un peu comme la cigarette, vient remplir le vide. Je me demande pourquoi le vide nous angoisse autant... Peur de se retrouver face à nous-mêmes ? De n'avoir rien d'intéressant à se dire ?
Merci Maud pour ces réflexions.