L'art de se répéter
#179 Ou pourquoi il est bon de radoter
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Au programme
Introduction
L’attention des gens est faible
Les gens oublient
Les lecteurs changent
La force de la répétition
Conclusion
Introduction
— “Et pourquoi tu n’es pas sur Instagram toi ?”, m’a demandé Lucie de l’autre bout de la piscine.
J’ai rencontré Lucie cet été, lors de ma semaine en Ardèche avec une bande de copains entrepreneurs. C’était la copine d’un copain, et elle ne dérogeait pas à la règle : elle était entrepreneure dans le secteur de l’immobilier.
— “Je ne sais pas… Je devrais y être je pense, mais j’ai du mal à être sur tous les fronts. Sur Instagram, il faudrait que je publie tous les jours pour que ça amène quelque part, et je n’ai pas le temps de produire autant de contenu, en plus de ce que je produis déjà sur LinkedIn et en newsletter”, je lui ai répondu, en donnant un petit coup de pied dans l’eau pour déplacer la bouée sur laquelle j’étais avachie vers elle.
— “Mais parce que tu ne pourrais pas utiliser ce que tu fais sur LinkedIn et en newsletter pour les mettre sur Instagram ?”
— “Ben… Si. Si j’étais intelligente, c’est ce que je ferais. J’ai plus de 170 newsletters de rédigées et 300 posts LinkedIn. En soi, si je découpais tout ça en posts Instagram, j’aurais 2 ans de posts devant moi. Mais je ne sais pas… J’ai peur de me répéter et que les gens s’ennuient.”
Et, alors que je me cherchais autant d’excuses que de moyens pour m’extraire de cette bouée dans laquelle j’étais trop enfoncée sans finir à l’eau, je me suis dit que c’était vraiment stupide. Il fallait que j’accepte de finir mouillée. Et il fallait que j’accepte de me répéter.
Alors, voici ce dont j’essaie de me rappeler :
L’attention des gens est faible
De plus en plus faible.
Dans son livre “On vous vole votre attention”, Johann Hari rappelle que le temps moyen de concentration sur un écran est passé de 2 min 30 en 2004 à 47 secondes en 2020 selon des chercheurs de l’Université de Californie.
Il explique que « Même quand nous lisons un livre, la tentation de vérifier nos téléphones interrompt notre concentration. Nous vivons dans un environnement qui fragilise systématiquement notre capacité à nous plonger dans une tâche longue. »
On a tendance à penser que les gens accorderont une attention presque militaire à nos contenus. Qu’ils liront chaque ligne, chaque mot, chaque virgule. Mais la réalité, c’est que la plupart des lecteurs liront vos posts en travers, une ligne sur deux, et qu’ils n’iront probablement pas jusqu’au bout.
Alors, même s’ils étaient amenés à lire deux fois le même contenu, les chances pour qu’ils s’en rendent compte ne sont pas si élevées que ça.
Les gens oublient
Récemment, j’ai fini de lire “Mémé dans les orties” d’Aurélie Valognes. Un petit livre de 250 pages très faciles à lire, que j’ai englouti en quelques jours à peine. Et pourtant, à la page 236, un dénommé Eric est apparu, et je ne savais plus qui était ce personnage. Mais genre vraiment plus.
Je fais partie de ces gens qui se vantent d’avoir une bonne mémoire. Donc pour moi, oublier un personnage en l’espace de quelques pages et quelques jours, c’est un affront.
Mais c’est aussi l’occasion de se rappeler que justement, on ne peut pas attendre de notre lecteur qu’il se rappelle de tout. Vous comme moi, on lit les posts aux toilettes, dans le métro, ou entre deux tâches.
En 1885, Hermann Ebbinghaus a montré que nous oublions environ 60% d’une information en 24 heures. En un mois, la quasi-totalité est perdue, sauf si répétée.
Note :
À chaque fois que ça m'arrive, ça me parait fou, mais j'oublie mes propres contenus. Parfois, je relis des posts ou des newsletters qui datent de plus d'un an, et je me surprends moi-même. "Wow, c'est moi qui ai écrit ça ?!".
Si vous écrivez du contenu depuis longtemps, je ne peux que vous conseiller d'aller faire une petite visite dans le passé de temps à autre. C'est une expérience étrange de lire ces propres contenus comme si c'étaient ceux d'un autre parce que vous les avez oublié. Mais c'est le moyen le plus efficace que je connaisse pour être un lecteur objectif avec soi-même.Les lecteurs changent
Si vous postez déjà, vous avez dû remarquer que vous avez un petit groupe de lecteurs fidèles qui likent tous vos contenus. Néanmoins :
Je peux vous assurer que même ceux-là ne lisent pas tous vos contenus avec l’attention la plus religieuse.
Que même ceux-là oublient ce que vous avez écrit au bout d’un moment car ils lisent d’autres choses que vos contenus.
Et que ces personnes-là vont changer sur le temps long. Personne ne lit 100% des contenus du même auteur pendant toute sa vie. On a des phases, et c’est normal.
Donc même si vous republiez un contenu tel quel d’une année à l’autre, rappelez-vous que les lecteurs ne seront probablement pas les mêmes.
Deuxième chose : les lecteurs ne sont pas les mêmes d’une plateforme à l’autre.
Prenons par exemple Marie Robert que j’adore. Tous les jours, elle rédige un post qu’elle publie sur Instagram, LinkedIn, et Substack. Personnellement, je dois voir un post ou deux posts sur Linkedin par semaine, et parfois sur Instagram mais très peu car je n’y suis pas beaucoup. J’ai dû tomber UNE fois sur le même post sur les deux plateformes, et je ne lui en ai pas voulu.
Note :
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je déconseille de faire des "séries" sur Linkedin. La probabilité pour que les lecteurs qui aient vu le premier voit aussi le deuxième, puis le troisième et ainsi de suite, le tout dans l'ordre , est vraiment très très faible. La plupart des gens verront les posts dans le désordre, et il faut penser à eux.
C'est valable pour tous vos contenus. Pensez toujours à ceux qui débarquent, qui ne vous connaissent ni d'Eve ni d'Adam, et demandez-vous de quel contexte ils ont besoin pour comprendre.
Oui, ça fera une petite répétition pour ceux qui connaissent déjà, mais ils ne vous en voudront pas. Par exemple, je sais que dans cette newsletter, vous lisez les phrases d'intro "Bienvenue dans cette édition #179 des Persos de Maud ! On est désormais 22,916 ... Si ce n’est pas déjà fait, tu peux aussi :" la première fois. Et puis les suivantes vous passez directement au contenu.La force de la répétition
Le nombre d’études qui existent pour prouver la force de la répétition sur la mémoire est colossal, donc je ne vais pas vous dresser une liste exhaustive. Mais pour rappel, voici les informations les plus importantes :
L’effet de simple exposition (Robert Zajonc, 1968) : plus on est exposé à une information, plus elle devient familière et crédible. Même si on ne s’en souvient pas consciemment, la répétition crée une impression de vérité.
Le marketing rule of 7 : un prospect doit être exposé au moins 7 fois à un message avant de passer à l’action (concept popularisé dès les années 1930 dans l’industrie cinématographique).
Les neurosciences ont trouvé que la répétition activait le striatum et l’hippocampe, zones clés de la mémoire. Elle transforme une information “volatile” en automatisme.
Études Nielsen : la répétition augmente la mémorisation publicitaire jusqu’à un certain seuil (saturation ensuite).
Alors, vous me direz que la dernière étude de Nielsen montre qu’il y a une limite à la répétition et qu’il ne faudrait pas risquer la fameuse “fatigue publicitaire”. Et, oui, je suis d’accord.
Néanmoins, je pense que si vous avez lu cette newsletter jusqu’ici, c’est que vous ne faites pas partie de cette catégorie de gens qui radote sans cesse et qui se répète. Donc avant de passer le cap de la fatigue, vous avez de la marge.
Beaucoup de marge.
Conclusion
En bref, voici tout ce que vous pouvez faire sans risquer “d’ennuyer” vos lecteurs :
Recycler des contenus (vraiment un copier-coller sans vergogne. Si le post date de plus d’un an, vous ne prenez aucun risque).
Rappeler des informations dans vos contenus. N’hésitez pas à redonner régulièrement du contexte, comme ce que vous faites et vendez par exemple.
Copier vos contenus d’une plateforme à une autre. Peu de personnes liront les deux.
Voilà, c’est tout pour aujourd’hui ❤️.
Maud
PS : et si vous avez d’autres questions, n’hésitez pas à les poser en commentaires !
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Excellente édition ! Apprendre à se répéter sans relâche, mois après mois, est une compétence plus complexe qu'il n'y paraît :)
(D'où l'intérêt pour les créateurs de contenu d'avoir un bon système de repurposing & de recyclage)
Merci Maud (je me répète).